Un peu de réserve…

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Je demeure généralement neutre au sujet des Amérindiens, parce que j’adore leur culture. Je considère qu’ils bénéficient d’avantages qu’ils ne méritent plus depuis des générations et des générations, mais je me tais. Pas envie d’entendre un clown me dire que toutes terres leurs appartenaient il y a quatre cents ans. Ça, c’est clairement une connerie, parce que la terre n’appartient à personne. Particulièrement quand tu ne paies pas un sou pour l’acheter. D’être le premier sur place ne donne aucun droit, où les Vikings posséderaient tout le bataclan, dans le coin, pour s’être pointé avant Cartier.

Pas envie non plus de m’entendre raconter à quel point il est dur d’être un Amérindien. C’est dur pour moi aussi, et je suis blanc. C’est dur pour tout le monde. Question racisme, je connais des noirs qui en ont vachement plus bavé que l’Amérindien moyen, et ils n’habitaient pas sur un territoire protégé.

Surtout, je n’avais pas envie de dire que question racisme, envers tout ce qui n’est pas amérindien, nos premières et glorieuses nations n’ont rien à envier au premier connard venu.

Marvin et Terry McComber en savent désormais quelque chose…

Marvin et Terry s’aiment. Ils ont des enfants. Ils ne l’ont pas facile non plus, parce qu’ils sont humains, comme la plupart d’entre nous. Parce que leur vie n’était pas assez compliquée, ils ont osé (oh les épouvantables décadents!) se marier, même si Madame n’était pas Mohawk. Pire: ils ont eu l’outrecuidance de s’installer à Kahnawake avec leurs enfants, même si une des règles de la réserve interdisait à madame de venir y vivre, uniquement parce qu’elle ne fait pas partie de la tribu. Ils ont payé leur terrain comme n’importe qui l’aurait fait, n’importe où… Ils y sont depuis des années, et je prendrais la chance de dire qu’ils ne sont pas confrontés au racisme pour la première fois, mais ils ont tenu bon. C’est déjà du boulot d’élever sa progéniture décemment, et de joindre les deux bouts, mais les McComber ont ajouté l’étroitesse d’esprit de leurs voisins sur la pile et ont continué leur train-train.

Ces derniers temps, toutefois, ils ont compris que ceux qui crient au racisme depuis leur naissance sont tout à fait capables de propager ce mode de pensée… Depuis des années, c’était latent, par en-dessous, chuchoté. Désormais, leurs voisins, peut-être inspirés par des milliers de jeunes imbéciles partout dans la province, ont sorti leurs pancartes.

Quelqu’un a targué le mot FROG sur leur résidence. Parce que non contents de défier les lois du Québec, qui devraient pourtant avoir préséance sur les leurs, nos amis, sur cette réserve, n’aiment pas non plus les francophones. Charmant. Une quarantaine de personnes a fait le pied de grue devant la résidence des McComber durant une journée complète, cette semaine, pour réclamer leur départ. Rien que ça. Paquetez vos petits et débarrassez. On ne veut pas de vous ici.

C’est marrant, mais ça rappelle drôlement d’autres groupuscules, qui se massaient devant la maison des rares noirs qui parvenaient au rang de propriétaire, au début des années ’20, aux État-Unis. De là à ce que des cagoules apparaissent, il n’y a qu’un pas.

Ils ont graffité la maison du couple. Ils ont réservé le même sort à la voiture de M.McComber, pourtant Mohawk.  Ils ont crié des slogans sous-entendant que la présence de Mme McComber était illégale. Illégale, je vous demande un peu…

Pour se justifier, ces hurluberlus soutiennent que les McComber habitent leur réserve  contre la volonté de la communauté, comme si celle-ci était en droit de quoi que ce soit, face à un propriétaire légitime. Voilà ce que ça donne, de faire croire à des individus limités qu’ils sont spéciaux, et qu’ils ont des droits qui non seulement sont refusés à d’autres, mais sont également aussi obsolètes que la Poune. Je parle ici des sombres crétins qui se sont attroupés devant la maison des McComber, et non des Amérindiens en général, vous l’aurez compris…

Nous sommes en 2015. Je le dis, parce qu’on pourrait l’oublier, vu que le temps passe vite. Ce que ces individus sont allé crier n’a rien à voir avec le fait que Terri vit sur la réserve. Leur cas n’est pas unique, dans l’histoire, et ça se termine généralement comme ça. Ils sont venus déplorer que Terri vit AVEC MARVIN. Ils sont venus punir Marvin McComber d’avoir osé diluer un peu plus l’héritage génétique des Mohawks en s’alliant à une blanche.  Peut-être ne vit-on plus à une époque où l’on peut faire de ta vie un enfer en faisant de toi un paria, mon cher Marvin, mais on peut assurément te faire chier et t’obliger à aller vivre ailleurs…

«On fait ça pour nos enfants et nos petits-enfants» a dit le chef des Mohawks pour justifier leur manifestation. Rendu là, faites bâtir un mur autour de la réserve et demeurez-y enfermés… Ce qu’il faut comprendre de leurs discours, c’est que s’il fallait que la moitié des Mohawks vivant sur la réserve marient des blanches, et que les trois quarts de leurs enfants métis fassent de même, une génération plus tard, Kahnawake finirait par devenir une réserve remplie de blancs, et que les avantages octroyés aux premières nations, qui se justifient déjà difficilement dans le contexte économique actuel, disparaitraient également. Ce n’est assurément pas à l’avantage des purs et durs qui tirent déjà le meilleur de notre sentiment de culpabilité collectif.

Ils vont foutre Marvin et Terri dehors; garanti sur facture. Même avec Me Gray pour les défendre, c’est clair que la loi de la réserve va prévaloir. Les enfants devront s’acclimater à un nouveau milieu, probablement blanc, et feront peut-être face, encore, au racisme. Ils vont surtout dériver loin de la magnifique culture autochtone, que de moins en moins de gens prennent la peine de mettre de l’avant. Si les enfants métis sont envoyés au loin, et qu’une part seulement de la génération  »pure » a à coeur d’apprendre, et de transmettre au suivant les traditions propres à chaque nation, ce savoir deviendra de plus en plus rare.

Quant aux individus possédant l’énergie, le temps, la passion, et le savoir, ces leaders qui pourraient changer les choses, ils manifestent, et taguent la voiture des gens qui ne cadre pas avec leur idéal autochtone…

On n’en sort pas…

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  1. Marie-Helene dit :

    Et ça, sans dire que les terrains de la réserve n’appartiennent même pas aux Amérindiens, elles appartiennent au gouvernement, et ne leur sont que « prêtées »; donc, quelle est la logique quand tu demandes à quelqu’un de quitter ton territoire, alors que la place ne t’appartient même pas?!

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